C’est au Sénat français que le PNND a tenu un colloque international sur le désarmement nucléaire. Parlementaires, responsables gouvernementaux, diplomates, analystes politiques et membres de la société civile ont discuté de l'impact humanitaire des armes nucléaires.
Le 15 janvier 1964, le général De Gaulle a signé le décret lui autorisant l’emploi de l’arme atomique. Aucun débat public ou démocratique sur une telle doctrine n’a été réalisé par les parlementaires français ou les décideurs politiques par la suite ou dans les années suivantes.
En France, il faudra attendre le 20 janvier 2014, soit cinquante ans plus tard, pour que ce sujet tabou, soit porté à la connaissance des parlementaires et de la société civile lors d’un colloque international. Il a été organisé par les Parlementaires pour la Non-prolifération nucléaire et le Désarmement (PNND) et l’Observatoire des Armements et sous les auspices des sénateurs, et leaders du PNND, Richard Tuheiava et Leïla Aïchi.
Cet événement n’était pas seulement un succès mais une réelle victoire pour l’abolition nucléaire.
Près de 200 personnes - dont des parlementaires, des représentants du gouvernement, des diplomates, des analystes politiques et des représentants de la société civile - ont participé à la conférence et se sont engagés dans des discussions sur les grandes questions autour de l'arme nucléaire, l'impact humanitaire, les conséquences sur l'environnement et le rôle du Parlement pour faire avancer le désarmement nucléaire.
La première table ronde a abordé les questions des conséquences médicales, humanitaires, environnementales et économiques des armes nucléaires. Les intervenants du Kazakhstan, de la Polynésie, de la Chine et de l’Algérie ont décrit l'impact des essais d'armes nucléaires sur les humains.
La table ronde incluait aussi une présentation de M. Antoine PEIGNEY, Directeur des relations internationales pour la Croix Rouge, dans le cadre du suivi des résolutions adoptées en 2011 et 2013 par le Conseil des délégués des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge sur l'incompatibilité de l’utilisation des armes nucléaires avec le droit international humanitaire (DIH), et la nécessité impérative de parvenir au désarmement nucléaire . (Voir International Red Cross Movement calls for nuclear abolition: adopts 4-year action plan). Antoine Pigney a toutefois expliqué que les pays qui, comme la France, font reposer leur dissuasion sur les armes nucléaires, croient que le DIH ne contredit pas ces mesures de sécurité, estimant que leurs armes nucléaires ne seront pas utilisés et qu’elles empêcheront une attaque et l’utilisation des armes nucléaires par les autres pays.
La deuxième table ronde a examiné la manière dont l’aspect humanitaire, servant à favoriser le désarmement nucléaire, avait permis de renforcer la traction pour le désarmement nucléaire multilatéral - un processus qui a été bloqué pendant de nombreuses années. Les représentants des gouvernements de la Norvège et du Mexique ont expliqué le contexte dans lequel s’est tenue la conférence internationale à Oslo (mars 2013) et celui dans lequel se tiendra celle au Mexique (février 2014) sur cette question. Ils ont fait remarquer qu’un niveau élevé de gouvernements serait prêts à supporter une déclaration gouvernementale conjointe sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires. Les défenseurs de la société civile issus du PNND, le World Future Council, l'organisation Article 36 et les campagnes visant à interdire les mines terrestres et les armes à sous-munitions ont souligné l'importance du cadre humanitaire pour engager la société civile. Les personnes du monde entier peuvent plus facilement comprendre, identifier et lutter contre les armes nucléaires en ayant conscience de leurs effets négatifs plutôt qu’en ayant à discréditer toutes les raisons de sécurité ésotériques qui appuient la dissuasion nucléaire.
Alors que jusqu’à présent la France refusait de se prononcer sur l’aspect humanitaire, la présence à ce colloque de l’Ambassadeur de France à la Conférence du désarmement, M Jean-Hugues Simon-Michel doit être soulignée. C’était la première fois qu’un représentant pour la France prononçait un discours complet et officiel sur le cadre humanitaire. Il n'a pourtant pas signalé un revirement de la politique française qui, comme l’a expliqué M. Simon-Michel, soutient une approche "étape par étape" ralentie pour parvenir au désarmement nucléaire. Toutefois, la reconnaissance par la France de la légitimité du débat sur l’aspect humanitaire est un changement positif et ouvre la porte à un engagement plus profond de la part du gouvernement français sur la manière dont la France pourrait s’extraire de sa dépendance aux armes nucléaires.
La troisième table ronde, qui a examiné le rôle et le pouvoir des parlementaires européens et français en matière de désarmement nucléaire, comprenait des parlementaires de la Belgique, du Royaume-Uni et de la France. Ils ont donné des exemples encourageant de questions parlementaires et de débats qui ont été menés dans leurs parlements respectifs et ont expliqué l'impact que ces derniers ont eu sur les gouvernements. Les parlementaires ont constaté que les problèmes budgétaires en Europe font qu'il est plus facile que dans le passé de soulever des questions sur les coûts financiers des armes nucléaires. Discuter de l'utilité de la dissuasion nucléaire dans les questions de sécurité mondiale caractérisant le 21ème siècle devient possible.
Il y a un an, le PNND France a organisé un premier événement à l'Assemblée nationale intitulé « La dissuasion nucléaire : ouvrons le débat ». Un an après, le débat s’est amplifié engageant à ce titre des parlementaires de tous les bords politiques et des représentants du gouvernement et des principaux think-tanks. Et le débat évolue dans le bon sens – d’un gouvernement qui défend les armes nucléaires sans se poser de questions à celui qui prend en compte la valeur et les conséquences d'armes nucléaires et les possibilités pour parvenir au désarmement nucléaire.
Un grand merci à Jean-Marie Collin, Directeur pour la France du PNND, et à Patrice Bouveret, Directeur de l’Observatoire des armements, pour avoir organisé ce colloque.
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